La méthanisation : une usine à gaz

Bretagne Vivante incite les agriculteurs et les collectivités à ne pas investir dans des unités de méthanisation préjudiciables à l’environnement, mais aussi au métier d’agriculteur

Utiliser le procédé biologique naturel de la méthanisation pour produire de l’énergie, l’idée semble belle sur le papier. Sauf qu’en réalité, passée à une échelle industrielle, elle génère des déséquilibres environnementaux et de nouvelles contraintes financières sur le monde agricole. Malgré des expérimentations peu concluantes ces dernières années, la France prévoit la construction de 1 500 usines de méthanisation d’ici 2020, dont plus de 100 en Bretagne. Explications.

Tout d’abord, la méthanisation, qu’est-ce que c’est ? Il s’agit d’un processus de transformation biologique, par différentes bactéries, des molécules de carbone plus ou moins complexes qui composent la matière organique. En gros, on apporte au méthaniseur des matières carbonées (agricoles, agro-alimentaires, boues de stations d’épuration…), et leur transformation produit de l’énergie. En théorie, cela semble être une solution miracle pour produire de l’énergie tout en supprimant les déchets.

Malheureusement, en réalité, ce procédé qui semblerait écologique, s’avère être une fausse bonne idée, néfaste pour l’environnement. Elle incite en effet à produire ces déchets de manière toujours plus intensive pour rentabiliser les installations. Il s’agit alors d’un modèle ultra-productiviste, qui génère une surproduction agricole, des pollutions des eaux et des nuisances diverses (émanations d’odeurs et pollution de l’air, perte de vie dans les sols). De plus, en France, des OGM sont aujourd’hui autorisés dans le cadre de la méthanisation.

« Ce n’est pas avec la méthanisation qu’on va régler le problème des algues vertes en Bretagne, car les excès d’azote ou de phosphore ne sont pas réduits, explique Claude Poupon, administratrice de Bretagne Vivante et cultivatrice bio. De plus, c’est une façon de demander aux agriculteurs de gérer, par exemple, le problème des boues de stations d’épuration, en les leur transférant. Car, oui, à un moment ou un autre, ces « déchets de déchets », hyperconcentrés, vont finir sur la terre agricole. Et après, on va encore dire que ce sont les paysans qui polluent ! »

La méthanisation n’est pas bonne pour l’agriculture car elle contribue à la dégradation des sols. Les productions agricoles devraient retourner au sol et contribuer à l’enrichir pour qu’il reste vivant. Et non pas servir de carburant pour être transformées en méthane.

« La méthanisation est un procédé gérable à l’échelle domestique, pas à l’échelle industrielle, ajoute la cultivatrice. On en vient à demander aux agriculteurs de produire de quoi alimenter les méthaniseurs en ayant recours à des cultures dédiées à cet usage (herbe, colza…). Or les agriculteurs sont là pour produire des aliments pour les hommes, pas pour produire des carburants. Plutôt que de chercher quoi faire du surplus de production, ne faudrait-il pas mieux prendre le problème à la source et se demander comment produire moins de déchets ? »

De plus, la méthanisation est une cause supplémentaire d’endettement pour les agriculteurs, qui augmente la dépendance au modèle intensif voire les amène à changer de métier pour devenir énergiculteur.

Par ailleurs, ces usines à gaz sont à risque d’accidents (explosions ou risques sanitaires) et donc de pollution.

Concrètement, quelles sont les solutions ? Plusieurs pistes sont à explorer :

  • Une vraie réflexion sur l’énergie, suivie de mesures à prendre. Il est ainsi nécessaire, à l’échelle collective et individuelle, de réduire la surconsommation d’énergie, en commençant par lutter contre le gaspillage énergétique (éclairage nocturne par exemple)et apprendre une meilleure gestion de l’énergie.
  • Des mesures à prendre également concernant les déchets domestiques mais aussi industriels : les recycler c’est bien, mais en produire beaucoup moins, c’est mieux.
  • Au lieu d’inciter au développement d’usines à gaz pour produire de l’énergie, privilégier la conception de solutions simples et faciles à entretenir et inciter les industriels et entreprises à produire leurs propres énergies, sans s’appuyer sur la terre agricole pour fournir un gaz potentiel, coûteux pour tous et dont les déchets sortants sont de véritables polluants.
  • Privilégier des filières énergétiques moins polluantes car moins intensives, et privilégier toute solution réfléchie en fonction de nos vrais besoins et non selon des critères purement financiers (ex. : petit éolien domestique, solaire domestique, petite hydro-électricité, etc.).

En bref, ne jouons pas les apprentis-sorciers et appliquons des solutions à taille humaine. L’agriculture, en particulier, ne peut pas être dépendante des fonds privés. Au-delà des problèmes environnementaux que cela pose, c’est un trop grand risque pour l’humanité. Aujourd’hui, nous pouvons, si nous le voulons, réduire notre surconsommation énergétique. Mais on ne peut pas, et on ne pourra jamais, se passer de manger !

 

Communiqué de presse de Bretagne Vivante

 




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